LE CABINET DE CURIOSITÉS DE DRESDE, ENTRE OUVERTURE D’ESPRIT ET PRÉJUGÉS

par Manuel Jennequin

Le jeudi 29 septembre, nous avons eu la chance d’aller au musée du Luxembourg voir l’exposition « Miroir du monde ». Elle regroupe de nombreux tableaux, objets et sculptures collectés entre le XVIe et le XVIIIe siècles par les princes-électeurs de Saxe. L’Europe est curieuse et collectionne les objets des pays lointains. On comprend qu’à cette époque-là, la représentation des autres, qui ne sont pas Européens, est stéréotypée : couleur de peau, vêtements… On ne cherche pas à différencier les peuples, qu’on représente tous de la même façon, souvent comme des gens d’Afrique noirs avec des vêtements d’Amérique du sud. C’est cette idée qu’on se faisait des étrangers.
Nous avons également vu de nombreuses sculptures, comme, par exemple, une statuette européenne où figurait un Africain portant un plateau sur lequel il offrait des pierres précieuses et des richesses de son pays. On le représente comme inconscient de la valeur de ce qu’il offre au lieu d’en faire commerce. D’autres œuvres évoquaient le même sujet, comme certaines faites de porcelaine chinoise dont la technique fut adaptée en Saxe : vendant désormais des contrefaçons de porcelaines chinoises, les manufactures de Saxe se moquent souvent des Asiatiques dans les figurines qu’elles fabriquent, en les représentant en train de rire, ce qui n’était pas très flatteur pour l’époque. Sur ces figurines de porcelaine comme sur la statuette représentant un Africain, on peut voir que les personnages ont un sourire niais, la tête penchée et la bouche ouverte, ce qui était mal vu et qui faisait référence à un prétendu manque d’éducation, puisqu’on ne leur aurait pas enseigné les bonnes manières telles que les concevaient les Européens. Le racisme était très présent à cette époque-là et la diffusion de la technique de porcelaine chinoise et de la fabrication d’objets décoratifs a contribué aux moqueries.

Pour réaliser de nombreux objets d’art, les artisans européens, et notamment les orfèvres, utilisaient souvent des matériaux venant d’ailleurs. Par exemple, certains objet décoratifs étaient réalisés à partir de coquillages exotiques, ou alors avec des émeraudes ou des rubis venant d’Amazonie.

Dans les dernières pièces, nous avons vu quelques créations contemporaines destinées à faire réfléchir le visiteur sur ces cabinets de curiosités. Notamment un tableau peint en noir et blanc, qui nous faisait comprendre que les personnes noires étaient effacées, en arrière plan, alors que les personnes blanches rayonnaient de mille feux et étaient mises en valeur. Nous avons également vu une création étonnante qui était un tapis qu’on avait gratté. De loin ce tableau paraissait très beau, ressemblant à un feu d’artifice, mais lorsqu’on s’approche, on voit la violence du geste. Cela nous faisait comprendre que derrière une très belle oeuvre d’art, il pouvait y avoir de la violence et de la terreur.

L’exposition vue par Firdaws Bouaoun :

Au XVIème siècle, l’Europe collectionnait des œuvres mais pas n’importe lesquelles… Elle collectionnait des œuvres du monde ! Je vais vous en montrer et expliquer quelques-unes, qui sont les plus importantes du musée.
Maintenant, passons à la première :


1) Les cabinets de curiosités et la diffusion du racisme

Le racisme a toujours été présent, mais comment s’est-il diffusé ? Les cabinets de curiosités y ont contribué, notamment en faisant commerce de porcelaines représentant des personnages stéréotypés et à l’allure peu flatteuse : quand, après en avoir découvert le secret de fabrication jusque là bien gardé en Chine, les manufactures de Saxe ont commencé à créer des porcelaines « chinoises », voici le genre d’œuvres créées :


2) La représentation des non-Européens

Avant, les Européens ne cherchaient pas à savoir à quoi ressemblaient un Tunisien, un Indien d’Amérique ou un Japonais, par exemple. Comment les représentaient-ils ? Ils les représentaient le plus souvent avec une couleur de peau noire et habillés de vêtements amérindiens, quelle que soit leur origine.

3) Les œuvres « exotiques » créées par les Européens

Les gens se passionnaient pour la magie, qu’ils considéraient comme un médicament. Ont donc été collectionnés des couverts magiques, mais qui n’ont jamais servi à manger.
Mais il n’y a pas que cette œuvre : quelques Européens, et le prince-électeur de Saxe en particulier, ont aussi appris à fabriquer, selon la technique chinoise du tournage de l’ivoire, des sculptures sphériques réalisées à l’intérieur d’une sculpture. Impressionnant, non ?

4) Le signe de la science

Nous voici arrivés à notre dernière œuvre, qui montre la place de la science dans les cabinets de curiosités. Ce sont les globes, terrestre, céleste et même astrologique, qui ont été désignés comme le symbole de la science – mais bien évidemment il y a des fautes – et de l’ouverture d’esprit.

Un dernier témoignage :

L’exposition « Miroir du monde » au musée du Luxembourg présente une partie de la collection des princes-électeurs de Dresde qui, du XVIe au XVIIIe siècle, comme de nombreux Européens, s’intéressent aux pays lointains et décident donc de créer leur propre collection d’objets venant « d’ailleurs ».

Dans cette exposition, les « non-Européens » sont tous représentés de la même manière : corps africain et habits amérindiens. Selon moi, la plus belle représentation d’un « non-Européen » (bien qu’elle soit raciste) est une statue en représentant un, souriant la bouche ouverte et portant un plateau sur lequel se trouvent toutes ses richesses. A travers cette statue, les Européens veulent montrer la bêtise chez le « non-Européen », tout d’abord en lui faisant donner toutes ses richesses alors qu’il ne lui en restera plus mais aussi en le sculptant la bouche ouverte, ce qui, chez les Européens, est signe d’impolitesse.

Des clichés racistes sont également exposés à travers de fausses porcelaines chinoises fabriquées en Saxe et faisant passer les Chinois pour des personnes avares et bêtes, puisqu’elles avaient voulu garder le secret de la porcelaine pour elles.

Durant la visite, j’ai découvert des objets européens créés à partir de matériaux venant de l’étranger (comme des coquillages par exemple) et retravaillés en Europe. Il y en a de toutes sortes tels que des couverts, des théières ainsi qu’un petit bateau sur roues, une représentation de Poséidon et plus encore.

Lors de la visite, j’ai également aimé les globes terrestres et célestes représentant la science, ainsi que des objets à la pointe de la technologie de l’époque. J’ai aussi découvert un type de sculpture : des sculptures les unes à l’intérieur des autres qui sont faites à partir d’un seul bloc d’ivoire, en détachant des morceaux par de petits trous à l’aide d’outils très fin.